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Achilles Last Stand

It was an April morning when they told us we should go.
And as I turned to you, you smiled at me. How could we say no ?
Oh, the fun to have, to live the dreams we always had.
Oh, the songs to sing, when we at last return again.

Sending off a glancing kiss, to those who claim they know.
Below the streets that steam and hiss, the devil's in his hole.
Oh, to sail away, to sandy lands and other days.
Oh, to touch the dream, hides inside and never seen.

Into the sun, the south, the north, at last the birds have flown.
The shackles of commitment fell, in pieces on the ground.
Oh, to ride the wind, to tread the air above the din.
Oh, to laugh aloud, dancing as we fought the crowd.

To seek the man whose pointing hand, the giant step unfolds.
With guidance from the curving path, that churns up into stone.
If one bell should ring, in celebration for a king,
So fast the heart should beat, as proud the head with heavy feet.

Days went by when you and I, bathed in eternal summer's glow.
As far away and distant, our mutual child did grow.
Oh, the sweet refrain, soothes the soul and calms the pain.
Oh, Albion remains, sleeping now to rise again.

Wandering, wandering, what place to rest the search,
When the mighty arms of Atlas, hold the heavens from the Earth.

I know the way, know the way, know the way...

 

Le dernier combat d'Achille

Par une matinée d'avril ils nous ont dit que nous devrions partir.
Et quand je me suis tourné vers toi, tu m'as souri. Comment pouvions-nous dire non ?
Oh, tant de plaisirs en perspective, vivre nos rêves de toujours.
Oh, les chansons à chanter, quand enfin nous retournons à nouveau.

Adressant une moue de dégoût à ceux qui prétendent tout savoir.
Sous les rues qui fument et chuintent, le diable dans son trou.
Oh, naviguer au loin, vers les déserts et d'autres jours.
Oh, atteindre le rêve, enfoui bien profond et jamais déterré.

Dans le soleil, au sud, au nord, les oiseaux se sont enfin envolés.
Les entraves sont tombées, se sont brisées sur le sol.
Oh, chevaucher le vent, fendre l'air au-dessus de la mêlée.
Oh, rire à haute voix, nous combattions la populace tout en dansant.

Pour chercher l'homme providentiel, chausse tes Bottes de Sept Lieues.
Il te guidera hors du sinueux sentier qui se change en pierre.
Si une seule cloche devait sonner pour l'avènement d'un roi,
Les coeurs battraient à l'unisson, nous serions fier comme il se doit malgré nos pieds de plomb.

Les jours passaient, tous deux baignés dans une éternelle lueur d'été.
Si loin, si éloigné, notre enfant commun grandissait.
Oh, le doux refrain, apaise l'âme et calme la douleur.
Oh, Albion survit, s'endort à présent, mais se relèvera un jour.

Trouver le lieu idéal, après avoir tant erré,
Quand les puissants bras d'Atlas portent les cieux, depuis la Terre.

Je connais le bon chemin, je le connais, je le connais...

Albion : surnom de l'Angleterre

Atlas : Fait partie de la mythologie grecque. C'est un géant, condamné par Zeus à porter la voûte céleste sur ses épaules

 

Le thème : la quête du paradis lointain, dans la lignée des aventures épiques et héroïques chères à Plant. Le texte, quoique magnifique, n'est vraiment pas évident à comprendre...

"Quand les puissants bras d'Atlas portent les cieux" : donne une image de sécurité (c'est le moment idéal pour s'arrêter et trouver le bon endroit).

 

Commentaire de la traduction par Jérôme Pintoux :

- Ce texte de 1976 est très riche, mais c'est l'un des plus mystérieux qu'ait écrit Plant, avec Stairway To Heaven, Big Log et Battle Of Evermore. Le thème principal semble être le rêve de liberté et la disparition de toutes les entraves (ce motif revient à deux reprises). Les pieds marchent sur la terre mais la tête est dans le ciel. Dualité de l'homme ("as proud the head with heavy feet"). Les semelles de plomb n'empêchent pas l'homme d'être fier et de rêver. On songe un peu à la double postulation baudelairienne. C'est peut-être la dernière grande chanson de Led Zeppelin, les deux deniers albums n'ayant pas tenu leurs promesses.

- Le titre en est énigmatique : qui est "Achille" ? Le combattant troyen, l'un des artisans de la Guerre de Troie et de la victoire finale des Grecs ? (c'est possible, dans la mesure où le texte s'achève sur une autre référence à l'Antiquité : le géant Atlas).
"Achille" peut renvoyer aussi à l'homme providentiel, au nouveau roi souhaité ? Un jeu de mot dylanien comme dans Temporary Like Achilles, sur Blonde on Blonde (B.O.B...) : "temporary like a child", "éphémère comme l'enfance...".
Mais « Qu´un enfant se lève enfin » serait une traduction intéressante car cela reprendrait le mythe d´Arthur, enfant, saisissant Excalibur enfoncée dans l´enclume. On ne sait. La poésie est toujours plurielle.
« Qu´Achille vienne enfin ! » traduction sur le modèle du vers de Boileau : « Enfin Malherbe vint ! » (Art Poétique)

- "To sandy lands and other days" (deuxième couplet) : on connaît son amour du désert et des voyages dans le temps (cf. Kashmir)

- Le cinquième couplet paraît faire allusion au déclin économique et politique de l'Angleterre  (la blanche "Albion") à la fin des années 70 (chocs pétroliers successifs, inflation galopante, montée du chômage, mouvement punk, désespoir des jeunes et de la classe ouvrière, tatchérisation de la société sous la poigne de la "dame de fer...").

- Le couplet précédent évoquait déjà un "homme providentiel" qui pourrait être le prochain roi : dans les mythologies celtiques on attend toujours le retour providentiel du roi Arthur, blessé à mort lors d'un combat mais les fées ont emmené en Avalon, le paradis celtique, pour le soigner et le guérir, d'où il reviendra pour tenir son royaume..."les Anges d'Avalon" figurent, on le sait, dans Battle of Evermore, texte à mi-chemin entre la Quête du Graal et celle de l'Anneau : voilà tout l'univers de Plant...

- Les sentiments monarchiques de Plant sont clairs : "Si une cloche devait sonner pour l'avènement d'un roi Nos coeurs battraient à l'unisson..." mais la Reine-Mère n'abdiqua pas en 1976 et Prince Charles dut ronger son frein. En 2002, vingt-six ans plus tard, c'est le statu quo. Elizabeth II a fêté son jubilé. Et le Prince Charles blanchit sous le harnais. Les voeux de ce pauvre Robert ne se sont point exaucés...

- D'ailleurs, il y a beaucoup d'élitisme dans cette chanson : "dancing as we fought the crowd" (qui rime avec "ground"...) "tout en dansant nous combattions la populace" rappelle la superbe et la "supériorité" imaginaire du poète horatien qui s'écriait au début du Liber Tertius de ses Odes : "Odi profanum uolgus et arceo" "Je hais la foule des profanes et la tiens écartée" (traduction F. Villeneuve)

- Led Zepp croyait en un renouveau monarchique, s'identifiait aux races nobles des vikings (Immigrant Song...), ultime avatar des nostalgies les plus glauques d'un Gobineau (Discours sur l'Inégalité des Races) et peuvent sembler des plus suspectes. All My Love évoque le "proud Aryan"... Le Hard Rock français, l'un des avatars du Dirigeable, sera beaucoup plus politisé à la fin des années soixante-dix, beaucoup plus à gauche, rejoignant le courant libertaire : un morceau comme l'Elite de Bernie Bonvoisin, de Trust, relève du Hard Anar, ou du Hard Rock Gauchiste : il évoque l'arrivée des chars soviétiques à Varsovie et la force brutale qu'elle représentait : "L'élite est entrée sans prévenir... Devant leurs chars d'assaut vous n'aviez que vos idées..."

- "To seek the man whose pointing hands, the giant step unfolds" il est certain que la traduction littérale ne nous plaisait pas : "Pour chercher l'homme pointant la main, le pas de géant s'allonge" car elle manque de clarté et de poésie. Nous lui avons préféré la transposition suivante : "Pour trouver l'homme providentiel, chausse tes Bottes de Sept Lieues". Pour que le géant accélère l'allure il lui faut des chaussures magiques : nous avons pensé à celles de l'ogre du Petit Poucet (de Perrault) : qui faisait près de cinquante km à chaque pas (c'est quand même pratique...). Nous ne pensons pas que notre traduction soit infidèle, au contraire elle essaie d'apporter quelque précision. Mais Plant visiblement songe à Atlas.

- Cette recherche de l´homme providentiel me fait songer à ce passage de Yourcenar : « Ces années furent celles où, cherchant dans le passé un modèle imitable, j´imaginais encore possible l´existence d´un homme capable de « stabiliser la terre », donc d´une intelligence humaine portée à son plus haut point de lucidité et d´efficacité » (Discours de récipiendaire à l´Académie Française, 23 janvier 1981) Au début des années 50,  en pleine Guerre Froide, Marguerite Yourcenar trouva l´Empereur Hadrien comme modèle d´homme providentiel, et Robert Plant en 1976 songea au combattant troyen, quasi invulnérable puisque sa mère l´avait trempé dans le Styx, fleuve infernal immunisant (mais elle avait oublié de tremper les talons...)

- Très peu d´hommes providentiels dans l´Histoire d´Angleterre, très peu de « héros » ou de « sauveurs » : Arthur (sauveur mythique), Guillaume le Conquérant, Shakespeare, Cromwell, Newton, Disraeli, Churchill, mais c´est tout.